IRL - In Raph Life - la prise de son

Structure de l'article

L’épisode 4 de la websérie IRL - In Raph Life vient de sortir, et je suis très fier d’avoir participé à son élaboration. Je profite de la sortie de cet épisode pour faire un petit historique de la prise de son.

IRL - In Raph Life - S01e04

Comment j’ai capté le son pour IRL - In Raph Life, de l’épisode 0 à l’épisode 4

Contexte

Pour résumer : All Geek Studio, c’est 6 passionnés qui font (entre autres) une websérie, et je m’occupe du son. “Le son” est un sujet très vaste : enregistrer le son ne suffit pas, il faut ensuite le traiter, puis mixer les différentes sources (la musique, les bruitages, les voix …). Aujourd’hui, je n’aborderai que la prise de son. Je ne vais pas non plus présenter toute la théorie derrière le choix du matériel, je vous conseille plutôt cette vidéo de la chaîne CINEASTUCES.

Le Démarrage (épisode 0 à 2)

Dans les premiers épisodes le son était capté avec un téléphone portable (Samsung S4 Mini) pour la plupart des scènes, puis en partie avec un Rode VideoMic (branché sur le Reflex qui nous servait de caméra). C’est une combinaison que je recommande pour débuter : on peut obtenir un son intelligible sans vendre un rein.

Le Téléphone portable

Le téléphone portable permet de faire des prises de son correctes en intérieur. Pour démarrer une web-série, cela évite d’investir de suite dans du vrai matériel de prise de son. Le son est généralement meilleur que celui du micro intégré à la caméra, le rapport signal sur bruit est très correct sur certains modèles, et il est plutôt facile de placer l’appareil près des acteurs sans que le spectateur ne le remarque. Pour enregistrer les voix-off, pour peu que l’on dispose d’une pièce suffisamment silencieuse il fait également très bien l’affaire.

Cela reste tout de même moins performant qu’un micro au bout d’une perche (par là, j’entends “un matériel adapté manié par un bon perchiste”), et capter une voix dans une pièce qui a beaucoup de réverbération est faisable, mais demandera un traitement très agressif pour obtenir un résultat intelligible. En extérieur oubliez le téléphone portable : ce n’est vraiment pas adapté (sauf si vous investissez dans un micro cravate conçu pour être branché sur un smartphone et que vous parvenez à le protéger du vent).

le Rode VideoMic

C’est un petit micro canon à brancher directement sur l’entrée mini-jack de la caméra. La directivité est bonne (il enregistre ce qui est devant lui, et rejette très bien ce qui s’éloigne de cet axe). Quand on souhaite capter le son de ce qui est directement devant la caméra, il est très pratique. On peut même enregistrer en extérieur : ce n’est pas idéal mais ça dépanne (quand il y a vraiment du vent la bonnette incluse ne suffit pas). Le niveau de bruit est par contre plutôt élevé : on aura un son intelligible et exploitable, mais il ne sera pas nécessairement “beau”, puisqu’on aura un bruit de fond très présent. Il est possible de réduire ce bruit de fond, mais cela crée d’autres problèmes, et je parlerai de traitement de son dans un autre article.

Episode 3 : la perche

Pour l’épisode 3 on a investi dans du matériel un peu plus conséquent :

Le principe est relativement simple :

  • Le micro “vise” la zone d’où vient le son à capturer (typiquement : les voix des acteurs). Un micro hyper-cardioïde a une directivité intéressante, pour résumer très grossièrement il s’agit d’un micro canon adapté aux scènes en intérieur. En général on le place en hauteur, hors du champ de vision de la caméra et le plus près possible de la source sonore.
  • Le micro est dans la suspension fixée au bout de la perche. Le modèle de micro que j’ai choisi est très sensible : si on ne met pas de suspension, le moindre mouvement/glissement de doigt sur la perche sera enregistré et gâchera la prise.
  • Le câble XLR relie le micro à l’enregistreur.
  • Le preneur de son écoute en direct la prise grâce au casque. Un casque fermé ne restitue pas un son très fidèle, mais isole très bien de l’extérieur et ne crée pas fuites sonores (c’est à dire : le son qui sort du casque a peu de chances d’être enregistré par le micro).

Ce kit permet de réaliser de belles prises en intérieur. Lorsque j’ai constitué ce kit l’idée était d’améliorer la qualité de notre son sans nous ruiner : certains éléments de ce kit ont donc leurs limites et ne seront par exemple pas destiné à faire du cinéma, cependant avec un peu d’astuce ce matériel est amplement suffisamment pour avoir un rendu professionnel sur des scènes d’intérieur.

Les limites de ce kit

Le micro que j’ai choisi n’est pas forcément le préféré des professionnels mais semble être très utilisé dans les productions à petit budget : il est abordable mais chaque exemplaire a des caractéristiques uniques. Certains restitueront de manière parfaitement transparente le son qu’ils captent, d’autres le déformeront (selon la situation et l’appréciation, le son pourra être considéré comme légèrement coloré ou irrémédiablement dénaturé). Certains auront un excellent rapport signal sur bruit, pour d’autres il sera peut-être un peu moins bon. L’accent est mis sur la simplicité de fabrication et le prix, au détriment de la répétabilité des caractéristiques. Sur une petite production qui n’a qu’un seul perchiste ce n’est pas gênant, mais cela devient très handicapant sur une grosse production qui emploie plusieurs preneurs de son : d’une scène à l’autre, si la “personnalité” du micro change trop cela va s’entendre. Concrètement, je suis le seul preneur du son du groupe, et le son capté par l’Oktava MK 012 est bien plus facile à exploiter que le son d’un téléphone portable.

L’élément le moins performant de ce kit est l’amplificateur intégré à l’enregistreur. Avant d’être enregistré, le signal du micro a besoin d’être amplifié. Sur le DR-40, dès qu’on pousse l’amplification on augmente significativement le niveau de bruit. Le mieux est de ne pas utiliser l’amplificateur du Tascam DR 40, mais d’utiliser du matériel dédié de bonne qualité, comme le Sound Devices MP-1. Cependant un ampli de bonne qualité coûte à peu près aussi cher que tout le reste de mon kit de preneur de son, et souvenez-vous : l’idée était de ne pas se ruiner ! J’utilise donc l’ampli du Tascam DR 40, qui n’est pas le meilleur du marché mais qui reste tout de même exploitable pour des dialogues. Si vous souhaitez capturer des sons très faibles, investissez dans du matériel haut de gamme.

EDIT 03/08/2017 : Aujourd’hui il existe des enregistreurs disposant de bon pré-amplificateurs pour des budgets raisonables. Par exemple, le Tascam DR-60D MKii disposes de pré-amplis de bien meilleure qualité que ceux du DR-40, pour le même budget.

Zoom VS Tascam, l’éternel débat

J’entends beaucoup parler du Zoom H4n, le concurrent du Tascam DR 40. On me dit souvent qu’il est supérieur. C’est faux : il est juste différent ! Ces 2 appareils disposent de fonctionnalités légèrement différentes qui ne sont pas adaptées aux mêmes utilisations. Par exemple, je n’ai pas besoin des effets intégrés du Zoom, et je n’ai pas besoin que l’enregistreur me serve de carte de son USB. La sortie casque du Tascam DR 40 n’est pas jolie (le niveau de bruit est très élevé), cependant ce n’est pas important pour l’utilisation que j’en ai : elle me permet de vérifier grâce au casque que je capte correctement le son. La fonctionnalité qui m’a fait choisir le Tascam est la possibilité d’enregistrer avec 2 niveaux d’amplification différents : on enregistre une piste avec un niveau de référence, et une piste de secours à un niveau plus faible. Si le son sature par moments sur la première piste, on pourra récupérer le son de la deuxième piste qui sera moins fort, mais ne saturera pas. Je me sers régulièrement de cette fonctionnalité (note : sur un enregistreur disposant d’excellents pré-amplis qui génèrent peu de bruit, cette fonctionnalité est moins utile).

Episode 4 : le micro canon

Dans l’épisode 4 on a de nouveau des scènes en extérieur. Cette fois-ci nous n’avons pas utilisé le Rode VideoMic : ce micro est toujours présent, mais uniquement en doublon au cas où la prise de son principale serait inexploitable. Pour cet épisode nous avons utilisé un micro canon et une bonnette anti-vent, et on est resté dans l’esprit “petit budget”. Concrètement on prend mon kit de son de l’épisode 3, on enlève le micro Oktava et sa bonnette et on le remplace par :

Ce micro est l’un des plus abordables du marché. Il en existe des moins chers mais je les ai évités car je trouvais beaucoup d’avis très négatifs. Le son de l’EM 9900 ne sera pas aussi beau que le son d’un Rode NTG3, c’est certain. Il sera cependant plus propre et plus facile à exploiter que le son du Rode VideoMic. Il est aussi beaucoup plus long. En fait, il est plus long que la plupart des autres micro de sa catégorie. Ce n’est pas anodin : il ne sera pas toujours compatible avec les rangements et les protections conçus pour les autres micro canon.

La bonnette est très simple : c’est un morceau de fourrure synthétique. Il existe des systèmes plus performants, mais ils coûtent bien plus chers que mon micro !

Dans l’absolu, je recommande d’utiliser le micro Rode NTG3 (réputé pour son excellent rapport signal/bruit), une cage de type Blimp et une fourrure en cas de vent. Cependant si on veut préserver son budget, une suspension premier prix, un micro EM 9900 et une fourrure basique permettent déjà de faire des tournages en extérieur dans de bonnes conditions.

Conclusion

La prise de son, c’est avant tout beaucoup d’astuce. Si on a du budget pour aller avec, c’est mieux. Et un matériel performant n’est pas suffisant pour réussir une prise de son : il faut savoir le manier !

Bientôt j’écrirai un article sur le traitement de son, car une bonne prise de son ne vaut rien si elle n’est pas correctement utilisée. [EDIT] : l’article sur le traitement du son est disponible ici !


Publié le 29/08/2016