Comment avoir un bon son en visio ?

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Entre le télétravail et les équipes réparties sur différents sites, si vous êtes dans l’informatique, vous subissez participez probablement à beaucoup de visio-conférences. Vous avez certainement au moins un·e collègue dont le son est systématiquement dégueulasse. D’ailleurs, maintenant que vous y pensez, vous réalisez que vous ne savez pas vraiment gérer votre micro ? Pas de panique, j’ai quelques astuces !

Un bon son, mais pour quoi faire ?

J’ai été preneur de son et ingé son pour une websérie : travailler le son est devenu un passe temps qui me plaît beaucoup. Personnellement, cette raison me suffit, mais j’en ai une autre qui vous sera plus utile :

  • Vous semblerez plus intelligent·e avec un son de bonne qualité (c’est pas moi qui le dit, c’est “prouvé scientifiquement” comme les machins qu’on voit au téléachat)

Notes :

  • Ce guide sera également utile si vous faites des podcasts ou du stream
  • Le but est de correctement capter le son d’une seule personne

Principes

Mon besoin est le suivant :

  • Je suis radin, et je veux du son de bonne qualité.

Pour y répondre, voici comment je m’y prends :

  • J’utilise du matériel peu couteux, mais fiable et de qualité suffisante
  • Je règle ce matériel (égaliseur, compresseur, etc.)
  • Je place le micro proche de la source à capter (ma voix), et loin de ce qui peut générer des bruits parasites (mon clavier mécanique, les ventilateurs d’un PC portable, etc.)

Je vois régulièrement des personnes investir dans un micro à plus de 100€ et obtenir un son de mauvaise qualité parce qu’il n’est pas utilisé correctement, alors que je m’en sors très bien pour beaucoup moins cher. En vérité, gérer le son peut être une tâche assez ingrate et frustrante : il faut connaître pas mal de choses qui ne sont pas compliquées à maîtriser, mais pas simples à deviner.

Heureusement, on se facilite ici la tâche en se fixant un objectif précis : avoir un son correct pour de la visio ou du podcast. Autrement dit : on ne fait pas du cinéma avec des acteurs qui chuchotent, du vent qui souffle dans le micro, ou l’obligation de ne surtout pas voir le micro etc.

Testez, testez, testez

Quel que soit le matériel, quels que soient les réglages, je vous recommande de tester :

  • Utilisez Audacity (ou n’importe quel logiciel du même genre), enregistrez, et écoutez
    • Le signal de votre micro devrait être entre -18 dB et -6 dB environ. Trop en dessous, et personne ne vous entendra parler. Trop au dessus, et vous risquez de saturer
    • Vous entendrez aussi les plus gros défaut de votre son (saturation, trop étouffé, strident, etc.)
  • Appelez une connaissance via Teams, Zoom, Discord ou autre et demandez-lui ce qu’elle pense de votre son
    • Elle vous dira si votre son est trop faible, s’il sature, si on entend trop les collègues qui parlent à côté, etc.

En déplacement

Si vous travaillez en mode nomade, privilégiez du matériel simple : quelque chose de léger, qui fonctionne dès qu’on le branche, et qui possède quelques touches média (couper le micro, augmenter/baisser le son de sortie, etc.)

J’ai une préférence pour le classique “combiné micro casque USB avec suppression de bruits intégrée” à environ une cinquantaine d’euros. C’est basique, vous n’aurez pas un son d’animatrice de radio, mais ça sera bien mieux que le son de votre webcam parce que le micro sera beaucoup plus proche de votre bouche ! A ce tarif là, le rendu sera correct, mais le confort sera probablement très limité.

Si vous avez chez vous un combiné écouteur + micro pour smartphone, testez : si vous êtes satisfait du résultat, pas besoin d’acheter quoi que ce soit !

Si votre bureau est très animé, privilégiez du matériel avec une bonne suppression de bruits. Je conseille le modèle opencomm de Shokz qui isole vraiment bien votre voix.

En poste fixe

Si vous avez un espace de travail fixe (un vrai bureau, dans les locaux d’une entreprise ou chez vous), vous pouvez aller plus loin, et vous focaliser sur la qualité au détriment de la simplicité de mise en œuvre. Vous pourrez installer un mini studio de radio.

Micro

Vous voulez acheter un Blue Yeti pour faire comme les copains et les copines ? C’est probablement une très mauvaise idée : c’est cher, et ce n’est probablement pas adapté à votre usage. Ni à celui de vos ami·es : la vraie force de Blue, c’est le marketing, pas le produit.

En bref, les principales familles de micros sont :

  • Les micros à condensateur. Ils sont généralement très sensibles : on branche, ça capte du son. C’est intéressant, mais vos collègues entendront aussi très bien vos enfants qui jouent dans la pièce d’à côté. Pour notre utilisation, c’est pas terrible (a moins de vivre dans un studio de musique, vous vivez probablement dans le bruit)
  • Les micros dynamiques. On en retrouve sur les plateaux télé et les scènes de concerts : leur sensibilité est faible, ils sont conçus pour capter surtout ce qui est juste devant eux. C’est ce qu’on veut

Notes :

  • Les points ci-dessus sont des généralités, pas des règles absolues. On peut trouver des micros à condensateur moins sensibles que des dynamiques. Et il existe d’autres types de micro, mais pour aujourd’hui on les met de côté.
  • La légende raconte que les micros à condensateur ont un meilleur son que les micros dynamiques. Mais la légende est concentrée sur des cas d’usages qui ne sont pas le notre : le cinéma, le chant, etc. De fait, un micro plus sensible capturera mieux les subtilités d’un instrument ou d’une voix. Pour capter votre voix pour une visio, la qualité d’un micro dynamique est amplement suffisante
  • Pour rapprocher le micro de votre bouche, utilisez un pied ou un bras de micro. Si votre micro est léger (exemple : Shure SM 58 : 298g), un modèle premier prix fera l’affaire. S’il est plus lourd (Shure SM 7 B : 766g), investissez dans quelque chose de plus solide

USB ou XLR ?

Le micro USB est plus simple à utiliser : on le branche, et ça fonctionne. Mais je préfère avoir un micro avec un connecteur XLR : ça me permet d’avoir un système plus modulaire (un rôle = un composant), et de brancher le micro sur du matériel de traitement de son dédié. Parce qu’en théorie, il existe de très bons logiciels pour traiter votre son, mais en pratique, c’est vraiment pas simple !

Aussi, avec un système modulaire, je peux faire évoluer petit à petit mon matériel : si l’envie me prend un jour de capter deux voix plutôt qu’une seule, alors je pourrai réutiliser mon micro XLR dans mon nouveau système.

Voici quelques modèles :

  • USB
    • 40€ : t.bone MB 88U Dual : micro dynamique vraiment pas cher, devrait faire l’affaire.
    • 50€ : Razer Seiren Mini - une alternative au Blue Yeti, qui fait moins de choses mais le fait mieux
    • 100€ à 200€ : Elgato Wave - un micro correct livré avec plein de fonctionnalités intéressantes
  • XLR dynamique
    • 30€ : Samson Q7 - J’en ai 2, le son est d’enfer, c’est pas cher … et c’est introuvable à ce prix aujourd’hui
    • 25€ : Superlux PRA D1 - entre 25€ et 50€, on peut trouver ce type de micro, de qualité suffisante pour de la visio ou du podcast
    • 100€ : Shure SM58 - une référence, fonctionne bien, solide
    • 160€ à 300€ : Shure SH55 Series II ou Heil Sound The Fin - si vous avez une ligne de budget spéciale “look retro”

Quelques notes :

  • Je ne suis vraiment pas fan du son des micro Behringer et Tonor
  • Je n’ai pas inclus le Shure SM 7 B dans ma liste : il est très cher, très bon… A condition de le brancher au matériel adéquat. Si vous le branchez sur une carte son d’entrée de gamme, elle n’aura pas assez de gain pour en tirer un bon son.
  • “Le Razer Seiren et le Elgato Wave sont à condensateur, t’as pourtant dit que c’était tout pourri ! Tu nous mens ?” -> Non. Les fabricants de micro USB visent la polyvalence : dans ce contexte, un micro sensible est plus adapté, puisqu’il sera plus facile de l’utiliser pour capter un ensemble de personnes. Mais le principe clé reste le même : si vous ne voulez capter que votre voix, rapprochez le micro de votre bouche, et le rapport signal/bruit sera bien meilleur.

Un filtre anti-pop, c’est bien ?

Oui et non. Personnellement, je n’aime pas : ça prend trop de place.

Plutôt que de parler directement dans le micro pile devant vous, placez-le sur le côté, pointé vers le coin de vos lèvres (comme sur le magnifique schéma ci-dessous, qui représente une vue de dessus de ma tête et du micro). Ajoutez une bonnette bon marché, et vous n’aurez plus problème de plosives (les “p” et “t” qui provoquent des sons désagréables).

Schéma Paint : placement du micro

Je recommande de placer le micro à environ 15cm de vous. Le mien est bien plus proche : j’ai un clavier très bruyant, et le meilleur moyen de faire en sorte qu’il s’entende peu est de rapprocher le micro de moi (toujours dans l’idée d’augmenter le rapport signal/bruit).

Interface son

Si votre budget est serré, prenez une interface 16 bits avec EQ intégré : ça fera largement l’affaire. L’EQ, ou “Equalizer”, c’est le machin qui permet d’augmenter ou de baisser les sons graves et aigus (utile pour équilibrer le son d’un micro). Pour du podcast, l’interface 16 bits fera largement l’affaire, et la plupart ne nécessitent aucun driver pour fonctionner. Si vous comptez retraiter le son en post prod, choisissez plutôt du 24 bits, mais attendez-vous à devoir installer un driver.

Voici une sélection de matériel :

  • 16 bits
    • 40€ : Behringer U-Phoria UM2 - pas cher, compact
    • 40€ : the t.mix MicroMix 2 USB - fonctionne très bien avec mon Samson Q7. Possède un EQ basique, prend peu de place sur le bureau et a clairement un bruit de fond que j’entends, mais qui ne perturbe pas les autres
  • 24 bits
    • 90 € : Steinberg UR12 - C’est ce que j’ai pris parce que les drivers sont stables. Aujourd’hui, il existe de meilleures options : mêmes performances pour moins cher, ou plus de prestations pour le même tarif
    • 60€ : Swissonic UA-2x2 - Le son est bon, mais certains utilisateurs rencontrent des problèmes de drivers plutôt pénibles
    • 75€ : IMG Stageline MX-1IO - Les utilisateurs en semblent satisfaits, et avoir un vu-mètre pour régler le gain est un vrai plus
    • 90€ : Native Instruments Komplete Audio 1 - Pareil que l’IMG Stageline MX-1IO, mais produit par une marque plus connue

Egalisation

Si vous n’avez pas le budget, ne prenez pas d’EQ : votre micro étant conçu pour la voix, ça devrait le faire. Si vraiment vous voulez un EQ, prenez une table de mixage entrée de gamme (certaines font aussi office de carte son 16 bits), c’est suffisant pour démarrer. Pour aller plus loin, je préfère les EQ paramétriques : plus compliqués à prendre en main, mais permettent des réglages plus subtils. Vous vous en servirez surtout en post prod.

J’utilise la tranche “Enhancer” de mon DBX 286 S. Le nom des boutons est obscur (“LF DETAIL”, “HF DETAIL”), le manuel aussi, mais en bref :

  • Le bouton LF sert à booster les graves
  • Le bouton HF sert à booster les aigus
  • Evitez de les pousser à fond, leur effet n’est pas vraiment subtil

Quand j’en ai la possibilité, j’aime baisser aggressivement les fréquences inférieures à 70Hz, et baisser celles inférieures à 100Hz.

Compresseur

Si vous parlez à un volume plutôt constant, ne prenez pas de compresseur. Si vous alternez les cris et les chuchotements, cela peut vous servir : le compresseur va baisser le son quand il sera trop fort.

  • Bien réglé, il vous permettra d’éviter de saturer
  • Très bien réglé, il permettra à vos interlocuteurs ou auditeurs de ne pas avoir besoin de monter le son quand vous chuchotez, et de ne pas le baisser quand vous hurlez
  • Mal réglé, le son sera désagréable. Vos moindres respirations seront sur-amplifiées, votre son n’aura aucune dynamique (puisque tout sera au même niveau sonore), et l’écoute sera très fatigante. C’est le type de réglage utilisé par Virgin Radio et NRJ (car le besoin est “être intelligibile même sur un autoradio pourri dans une voiture bruyante”)

J’utilise un DBX 286 S (160€) : c’est plein de boutons, c’est un peu le bazar, mais c’est polyvalent. Je branche mon micro sur l’entrée de l’appareil, puis la sortie du DBX 286 S sur ma carte son, et ça fonctionne. Notes :

  • C’est un peu relou à régler. C’est logique : j’ai introduit de la complexité dans mon système. Pour que cette complexité se traduise par une amélioration de la qualité, il faut prendre le temps d’apprendre à utiliser le matériel
  • Le gain de ma carte son est baissé au minimum, je règle tout avec le DBX 286 S. En théorie, j’obtiens ainsi la meilleure qualité possible, puisque je n’utilise pas l’étage d’amplification de ma carte son

Suppression de bruits

Ma boite à tout faire (le machin de chez DBX) propose un “gate” : quelque chose qui coupe le son quand il est trop faible. C’est sympa, mais c’est limité.

Pour la suppression de bruit, au niveau matériel je n’ai rien d’autre. Mais ce n’est pas gênant puisque j’ai un micro peu sensible, qui capte surtout ma voix.

Par curiosité, j’ai testé NVidia Broadcast (en branchant un micro sensible, un jour où mon voisin faisait des travaux etc) : ça fonctionne très bien. C’est aussi très utile quand vous êtes en visio avec un·e collègue qui a un micro très sensible et un environnement de travail bruyant : oubliez la solidarité, et laissez-la souffrir, et n’écoutez que sa voix sans bruit parasite (c’est moche, mais vous n’aidez personne en souffrant inutilement).

Conclusion

Le son, c’est quand-même un peu chiant. Mais :

  • Avec ce guide, vous devriez être un peu moins perdu·e
  • Si vous avez besoin d’un coup de main, vous pouvez me contacter sur Mastodon, LinkedIn ou BlueSky

Pour vous aider un peu plus que cette courte conclusion, voici une liste de configurations que je recommande :

  • Starter kit USB : microphone dynamique USB à moins de 50€ + bonnette + bras de micro pas cher
    • Je n’ai pas testé cette configuration, mais en théorie elle devrait plutôt bien fonctionner
  • Starter kit XLR : microphone dynamique XLR à moins de 50€ + bonnette + bras de micro pas cher + table de mixage Behringer U-Phoria UM2
    • C’est ce que j’ai installé sur le bureau de ma compagne, et ça fonctionne vraiment très bien. Et on peut régler facilement le gain (ce qui n’est pas toujours le cas avec un micro USB) pour éviter de saturer !
  • Overkill : microphone dynamique USB à moins de 50€ + bonnette + bras de micro pas cher + DBX 286 S + Steinberg UR 12 MK2
    • C’est l’équipement que j’utilise sur ma machine personnelle. J’en ai fait l’acquisition pour faire autre chose que de la visio, mais j’étais très content de l’avoir quand je me suis mis au télétravail ! Le rendu est plus précis, plus fin qu’avec le Starter Kit XLR, mais personne d’autre que moi n’entend la différence. Mon conseil : commencez avec le Starter Kit XLR, et si un jour vous souhaitez travailler plus votre son, alors ajoutez-y un DBX 286S

Aussi, si vous partez sur du XLR, achetez de bons câbles. En théorie, la conception des câbles XLR minimise les bruits liés aux interférences électromagnétiques. En pratique :

  • Prenez-les de la bonne longueur. Trop long, c’est pas pratique, et vous augmentez le risque de capter des interférences
  • Un câble ridiculement fin sera probablement moins robuste qu’un câble plus épais. Mes références sont :
    • Longueur 1,50 m : câble Cordial à environ 15€
    • Longueur 3m : câble Fender à environ 15€

Publié le 02/04/2022